
Certains médias ont rapporté une déclaration attribuée à l’honorable députée Kadiata Malick Diallo, dans laquelle elle fait état de restriction du travail parlementaire de la part de certains organes de l’Assemblée nationale.
Étant donné que l’honorable députée a choisi les médias sociaux – plutôt que les instances de l’Assemblée nationale où son groupe parlementaire est représenté – comme canal pour exprimer sa dénonciation et sa condamnation de ce qu’elle considère comme une obstruction au travail parlementaire, un musellement des représentants du peuple et une transformation de l’Assemblée nationale en une simple Chambre d’enregistrement, la place qu’occupe l’honorable députée et le respect de l’opinion publique requièrent de notre part de faire les précisions suivantes :
1. L’honorable députée est sans aucun doute consciente – en tant que représentante du peuple pendant trois mandats – que les mécanismes de contrôle parlementaire de l’action du gouvernement sont nombreux et variés. Ils commencent par la question écrite et se terminent par la motion de censure, en passant par les questions orales avec et sans-débat, les interpellations, les commissions d’enquêtes et d’informations, en plus des déclarations gouvernementales prévues dans la constitution ; Chacun de ces mécanismes a sa propre forme, ses propres modalités, les limites de son usage et les conditions et exigences de son utilisation, le tout – bien entendu – conformément aux règles déterminées par les textes régissant le travail de l’Assemblée nationale.
2. L’honorable députée connait sans aucun doute – pour avoir fait partie des députés qui ont élaboré le règlement intérieur de la Chambre – que l’interpellation est utilisée à la place de la question, lorsqu’il s’agit d’une demande visant à obtenir des justifications concernant l’exercice par le gouvernement ou par l’un de ses membres de ses pouvoirs ou de la gestion d’un service public relevant de sa compétence, et l’interpellation doit être – entre autres conditions – justifiée par l’urgence et la gravité des faits qui la motivent (article 125 du règlement intérieur) ;
3. La députée a déposé une interpellation à l’Assemblée nationale le jeudi 3 avril 2025, concernant l’expulsion des immigrés résidant illégalement dans notre pays ; Un jour ouvrable plus tard, cette interpellation était à l’ordre du jour de la première réunion de la Conférence des présidents (l’organe chargé de programmer les séances de la chambre et de renvoyer les questions et interpellations au gouvernement). Il est à noter que le groupe parlementaire auquel appartient l’honorable députée -composé de 7 députés- est représenté par deux de ses membres à la conférence des présidents ;
La Conférence a décidé, sans recourir à un vote, de demander à la députée de transformer son interpellation en question orale, afin de garantir le respect des dispositions du règlement intérieur, car elle n’a trouvé dans les justifications qu’elle a présentées aucun motif ni de l’urgence ni de la gravité des faits qui ont conduit à l’interpellation. La députée ayant réagi gracieusement et de gaité de cœur, a retiré son interpellation et l’a transformée en question orale qu’elle a déposé auprès des services compétents le 9 avril, pour nous surprendre avec cette déclaration.
4. Le fait pour la Conférence des présidents de décider de l’utilisation par un député, quel qu’il soit, de façon inappropriée, de l’un des mécanismes de contrôle susmentionnés peut entraîner la perturbation de certains de ces mécanismes et le dévoiement du travail parlementaire, outre ce que cela implique en termes de non-respect voire de violation du règlement intérieur de la chambre par l’un de ses organes les plus élevés, à savoir la Conférence des présidents ;
5. L’honorable députée a reçu la réponse – comme le reste des citoyens – aux informations qu’elle demande, à de nombreuses reprises de la part de membres du gouvernement, y compris du ministre de l’Intérieur, de la Promotion de la Décentralisation et du Développement local, et même de responsables de pays frères voisins, y compris des collègues parlementaires qui ont récemment visité la Mauritanie. Nous n’avons entendu aucun de ces responsables (gouvernementaux ou parlementaires) qui, par enthousiasme ou excès de zèle dans la défense de leurs citoyens, ont qualifié ce que les autorités mauritaniennes ont fait d’« expulsion massive » ou ont remis en question la « légitimité de leur expulsion », comme l’a fait l’honorable députée, ce qui pourrait nous mettre dans une
1position embarrassante devant les responsables des pays frères, car notre comportement les fera paraître négligents dans la défense de leurs concitoyens, alors qu’ils reconnaissent l’illégalité de leur résidence et le bon traitement qu’ils reçoivent de nos autorités.
A cet égard, nous convions l’opinion publique à se référer aux déclarations des responsables sénégalais et maliens sur cette question;
6.
La question de la migration, en tant que besoin pour les peuples et les pays comportant des dimensions humanitaires et économiques, est également une question mondiale dans laquelle interfèrent d’autres dimensions d’ordre sécuritaire mais aussi liées à la souveraineté. Notre pays n’est pas le seul parmi les pays qui sont en proie à des problèmes de migration et encouragent les résidents sur son territoire à respecter les lois et règlements en vigueur.
Nous appelons ici aussi l’opinion publique à prendre en compte les pratiques mondiales en la matière et à considérer les mesures souveraines prises par tous les pays, au premier rang desquels figurent les pays classés comme démocratiques et respectueux des droits de l’Homme.
7. L’exercice du contrôle parlementaire sur l’action gouvernementale n’a jamais cessé au cours des sessions parlementaires. En revanche, les honorables députés se conforment rarement à l’ordre du jour des séances plénières et des réunions des commissions spécialisées respectivement, pour discuter et étudier les projets de loi, et beaucoup d’entre eux consacrent la majeure partie du temps qui leur est accordé à interroger le ministre délégué par le gouvernement sur la gestion de son secteur, et même sur le travail du gouvernement en général. En outre, l’Assemblée nationale s’attache à programmer les questions orales conformément aux procédures régissant ses travaux, chaque fois que l’occasion se présente ;
8.Le souci de l’Assemblée nationale de veiller à ce que ses députés exercent leur devoir de contrôle sur l’activité gouvernementale en constituant une commission d’enquête parlementaire ne peut en aucun cas justifier la violation des dispositions du règlement intérieur de la chambre (comme c’est le cas de la demande de constitution de la commission évoquée dans la déclaration de la députée), même si le contrôle, comme nous l’avons mentionné, peut s’exercer par bien d’autres voies.
9.Notre pays est le premier en Afrique et le deuxième dans le monde arabe à avoir un parlement doté d’une chaîne de télévision. C’est le seul pays qui diffuse les délibérations parlementaires directement et sans interférence, et il n’y a aucun doute sur l’indépendance et sur l’égalité de traitement qu’elle accorde aux différents groupes parlementaires.
Cela en a fait un modèle à prendre en exemple. D’ailleurs des délégations parlementaires de pays frères nous ont récemment rendu visite pour tirer parti de cette expérience.
L’Assemblée Nationale