Mauritanie : encore un militant anti-esclavagiste derrière les verrous !

lun, 04/11/2019 - 09:43

La fameuse cellule des juges d’instruction au tribunal de Nouakchott-Sud, vient d’ordonner, le lundi 28 octobre 2019, l’emprisonnement de Sidi Ennagi, membre de IRA – Mauritanie  et volontaire du « comité de la paix », en charge de la sécurité de Biram Dah Abeid, député et Président de l’association, toujours non-reconnue. Cette cellule dont le chef de file  est le juge Ethmane ould Mohamed Mahmoud, fidèle aux milieux esclavagistes mauritaniens. La décision de mise à l’écrou de Sidi Ennaji, se fonde sur le grief d’ « agression contre un agent de police dans l’exercice de ses fonctions ».

Qui est Ehmane ould Mohamed Mahmoud?
Connu pour avoir livré une fille esclave à ses propriétaires en septembre 2019, le magistrat du siège s’opposait ainsi à l’emprisonnement des fauteurs de trafic, torture et d’exploitation de mineurs, malgré la réquisition expresse du Procureur de la république.

Non content de protéger les contrevenants à la loi, il poussa le zèle jusqu’à leur restituer la victime, disparue depuis dans la lointaine localité de Bassiknou ; il recevait alors le soutien de la Cour suprême. Ni la corporation des magistrats ni le ministère de la justice n’ont pris, à son encontre, les mesures de discipline que requerrait la gravité du manquement. Au lieu d’une radiation pure et simple, Ethmane Ould Mohamed Mahmoud sévit encore dans le prétoire. 

Que s’est-il passé? 
Le jeudi 24 octobre 2019, Sidi Ennagi travaille dans son atelier de soudure à Arafat (un quartier périphérique de Nouakchott) lorsqu’un taxi stationne, soudain, à proximité. Un client en sort, aussitôt poursuivi par le conducteur, lequel, enragé, lui réclame le prix de la course ; l’usager, se défend de toute grivèlerie et, force protestations à l’appui, prétend l’antériorité du règlement. 

Le taximan empoigne le passager indélicat et celui-ci se débat ; des passants s’interposent. Au terme de la rixe, un badaud chuchote, au chauffeur, que Sidi Ennagi, alors spectateur de l’attrapade, filmait la scène. L’auteur de la molestation inachevée se dirige vers le témoin présumé et le somme de remettre le téléphone. Sidi Ennaji  refuse d’obtempérer et précise que son appareil ne contient aucune image de l’incident. 

Furieux et manifestement contrarié par son infortune, le chauffeur retourne dans le véhicule, s’y dévêt du boubou, le range à l’intérieur et revient vers Sidi Ennagi, auquel il assène des coups de poing, non sans fureur. Ce dernier tente d’abord d’esquiver la charge puis se met en posture de légitime défense.  

Incapable de terrasser Sidi Ennagi, le taximan démarre et revient, peu de temps après, entouré d’une escouade de gardiens de la paix, en uniforme ; les policiers expliquent à Sidi Ennagi, que le plaignant est un agent de police comme eux, et l’embarquent chez le commissaire Tar Ould Sweinee, tortionnaire notoire des militants abolitionnistes.

L’officier de l’ordre public procède à l’arrestation de Sidi Ennagi, le fait déshabiller et placer au violon. En vertu de la connivence ethnique et la solidarité de corps, tous confectionnent, à la va-vite, un dossier à charge, contre Sidi Ennagi. Le 28 octobre 2019, à présent identifié comme activiste des droits humains, militant d’IRA – Mauritanie, il comparait devant la cellule des juges d’instruction, qui ordonne son dépôt à la prison civile de Nouakchott. 

Quelles leçons en tirer ?
Il n’est plus nécessaire de rappeler la dureté de la coercition envers les noirs de Mauritanie en général mais surtout les militants d’ IRA – Mauritanie en particulier, ni, en comparaison, de relever la complaisance des segments de pouvoir au bénéfice des descendants de maitres, tous d’extraction arabo-berbère.

La récurrence des discriminations, y compris lors des nominations en conseil des ministres ou concours de recrutement pour les corps civils et militaires, illustrent assez l’évidence empirique des inégalités et, surtout, leur banalisation. Le délitement de l’Etat et la clochardisation de ses employés, atteignent un degré tel qu’un policier cumule, sans conséquence, le métier de chauffeur de taxi. A force d’impunité, de corruption et de laxisme, la Mauritanie est livrée à la médiocratie, poreuse à l’extrémisme religieux et en rupture d’avec la rigueur et le mérite.

La détention arbitraire de Sidi Ennagi procède de la sédimentation des injustices, dans une société de privilèges et d’abus, qui va à sa perte si le gouvernement du président Mohamed Cheikh El Ghazouani ne s’engage au plus vite dans un processus ses engagement de reforme envers le peuple et de dialogue ou concertations avec ses opposants.

Nouakchott 03/11/2019

La commission de communication